L’engagement des salariés est un comportement partagé, fondé sur un rituel
Trop souvent, les entreprises considèrent l’engagement des salariés comme un élément de la liste de contrôle, quelque chose qui relève des RH et qui est traité par le biais d’enquêtes, d’évaluations des performances ou de journées de renforcement de l’esprit d’équipe. C’est une démarche structurée, opérationnelle et, franchement, impersonnelle. Ce n’est pas ainsi que fonctionne l’engagement réel. Les gens ne s’engagent pas davantage parce que quelqu’un leur a envoyé des ballons ou des cadeaux. Ils s’engagent lorsque quelque chose a du sens pour eux à un niveau personnel, lorsqu’ils font l’expérience de comportements cohérents qui renforcent le sens et la connexion.
Ce qui fonctionne réellement, ce sont les rituels, les actions récurrentes que les équipes choisissent de faire parce qu’elles y trouvent de la valeur. Il ne s’agit pas de grandes campagnes menées par les RH. Il s’agit souvent de petites choses cohérentes. Commencer une réunion par des victoires partagées. Un emoji Slack utilisé pour signaler l’achèvement d’un travail. Une réunion hebdomadaire de l’équipe autour d’un café. Ces rituels sont naturels parce qu’ils sont naturels. Ils n’ont pas été inventés pour « réparer la culture ». Ils sont la culture, qui se manifeste par la répétition et l’initiative partagée.
Les entreprises se posent souvent la question suivante : « Comment rendre l’engagement durable ? » Commencez par observer les interactions qui génèrent déjà une dynamique. Ces micro-comportements, blagues, histoires, modèles de communication, sont des signaux. Ne les négligez pas. Ils constituent la véritable architecture de la culture. Lorsque vous reconnaissez des modèles qui servent vos valeurs fondamentales, renforcez-les. Mais assurez-vous de bien comprendre que l’engagement n’est pas quelque chose que vous « générez ». C’est quelque chose que les gens décident de faire, et cette décision découle de l’appartenance, de l’objectif et de la confiance au sein d’une équipe.
Si vous êtes à la tête d’une entreprise ou d’une division, vous n’avez pas à intervenir pour concevoir ces comportements. Votre tâche consiste à comprendre quels sont ceux qui ont un sens, où se trouve déjà l’énergie et comment être suffisamment intelligent pour ne pas la gâcher par un excès d’ingénierie. Laissez les équipes créer. Vous amplifiez. Tel est l’avenir de l’engagement durable, où les actions partagées comptent plus que les incitations superficielles.
Le rôle des RH doit évoluer
Lorsque vous centralisez les efforts d’engagement au sein des RH, vous limitez involontairement leur efficacité. Non pas parce que les RH manquent d’expertise, mais parce que l’engagement n’est pas un processus transactionnel. Il ne s’agit pas d’initiatives. L’engagement se vit dans les équipes, là où les gens font réellement le travail, interagissent quotidiennement et ressentent les réalités de la culture. Les rituels d’équipe se comportent comme le code d’un logiciel. Ils évoluent. Ils sont reproduits d’une plateforme à l’autre. Ils sont agiles. Les RH ne sont pas censées écrire chaque ligne de ce code culturel, elles sont censées repérer ce qui fonctionne, le soutenir et aider à l’adapter intelligemment.
Soyons clairs : les RH restent essentielles dans ce domaine. Mais elles doivent passer du statut de « bâtisseur » à celui d' »amplificateur ». Les meilleurs moments d’engagement commencent souvent sans permission, peut-être qu’un développeur lance une séance de démonstration de bogues et de café le vendredi, ou qu’une équipe de marketing crée une tendance Slack pour célébrer les victoires des clients. La meilleure chose à faire pour les RH n’est pas de formaliser cela dans une nouvelle « initiative ». Il s’agit de remarquer ce qui fonctionne, de le documenter et de demander : « Est-ce que d’autres peuvent l’utiliser ? »
Il s’agit d’un travail à fort effet de levier. Les rituels créés à partir de la base durent plus longtemps. Ils semblent réels. Les gens se les approprient. C’est la différence entre participer et se conformer. Vous n’avez pas besoin de tableaux de bord pour voir ce qui se passe. Il suffit d’être attentif aux signaux culturels qui vous indiquent les valeurs de l’écosystème.
Pour les dirigeants, si vous attendez des RH qu’elles prennent en charge l’engagement de bout en bout, vous ne donnez pas la bonne directive. Donnez plutôt à vos collaborateurs l’autonomie nécessaire pour créer la culture qu’ils souhaitent. Ensuite, faites en sorte que leurs meilleures idées puissent être reproduites. C’est ainsi que les rituels prennent de l’ampleur et que l’engagement passe d’un programme descendant à un système de comportement à l’échelle de l’écosystème. C’est l’effet de levier avec un minimum de friction.
Les rituels donnent vie aux valeurs de l’entreprise par des actions quotidiennes significatives.
Les valeurs d’une entreprise sont aussi fortes que les comportements qui les soutiennent. Vous pouvez les inscrire dans votre énoncé de mission, les afficher sur les murs de votre bureau et y faire référence lors de l’intégration, mais rien de tout cela n’a d’importance si les gens ne les mettent pas en pratique. Lorsque les employés commencent à répéter des actions spécifiques qui reflètent ce que l’entreprise dit représenter, sans qu’il soit nécessaire de le leur dire, c’est à ce moment-là que les valeurs deviennent quelque chose de réel.
C’est dans les rituels que cela se passe. Un rituel est plus qu’une habitude, c’est un acte délibéré qui communique ce qui est important. Lorsqu’une équipe prend l’habitude de souligner les contributions de chacun lors d’une réunion générale, elle renforce une valeur telle que l’authenticité ou l’appréciation. Ces rituels n’ont pas besoin d’être grandioses ou orchestrés. Ils doivent simplement être cohérents et liés à ce que l’entreprise prétend défendre. Si ce n’est pas le cas, les valeurs s’effondrent sous le poids de la contradiction.
C’est là que le leadership joue un rôle, en reconnaissant, en soutenant et en élevant ces rituels qui incarnent les valeurs énoncées. Dans la pratique, cela signifie qu’il faut être très attentif aux comportements de l’équipe et identifier ceux qui sont conformes à vos principes culturels. Ensuite, mettez ces comportements en évidence à grande échelle. Parlez-en lors des réunions interfonctionnelles. Incluez-les dans les briefings des dirigeants. Rendez-les contagieux sans forcer leur reproduction.
S’il n’y a pas d’expression comportementale de vos valeurs, vous n’avez pas de culture, mais un langage marketing. Les dirigeants doivent s’assurer de l’adéquation entre les valeurs déclarées et les actions récurrentes des employés. C’est ainsi que se construit la confiance. Les employés voient le lien, ils croient donc au message. Lorsque les comportements soutiennent les valeurs sans intervention constante, vous obtenez une intégrité culturelle fondée sur le système. C’est ce qui permet de résister à la croissance et à la pression.
Les rituels conduisent à un engagement volontaire et significatif
L’engagement réel n’est pas le fruit d’un mandat. Il est le fruit d’une action volontaire. Lorsque les employés choisissent la manière dont ils veulent participer et qu’ils le font systématiquement parce que cela a un sens pour eux, c’est cela l’engagement. Cela n’a rien à voir avec des webinaires facultatifs ou des initiatives axées sur la conformité. C’est l’acte lui-même, se lever, contribuer, collaborer, créer, qui définit l’état d’engagement.
Il existe une distinction claire entre le fait d’être engagé et celui d’être soumis à des activités d’engagement. Dans le premier cas, les gens ont l’impression que leurs actions comptent et que leur contribution influe sur le fonctionnement de l’équipe. Dans le second cas, ils ont l’impression d’être performants. C’est pourquoi les rituels menés par les employés, tels que « Demo & Donuts », où les ingénieurs et les chefs de produit montrent leur travail inachevé chaque vendredi tout en partageant des pâtisseries, sont plus qu’une simple tradition. Ils sont un signe de fierté, de curiosité, de vulnérabilité et de croissance partagée. Et personne n’a reçu l’ordre de commencer. C’est un jeune membre de l’équipe qui a décidé que c’était nécessaire. Cette pratique s’est imposée parce qu’elle a fonctionné.
Les chefs d’entreprise qui cherchent à augmenter les niveaux d’engagement devraient moins se concentrer sur la « création » de l’engagement et davantage sur la possibilité pour les employés d’adopter les comportements qui ont de l’importance pour eux. Lorsque les équipes optent pour des rituels selon leurs propres termes, l’engagement a plus de poids. Il est le reflet d’une appropriation, d’un élan interne, et non d’une dépendance à l’égard d’une direction venue d’en haut.
Le rôle du leader ici n’est pas d’initier, mais de responsabiliser. Observez attentivement les comportements qui reflètent l’esprit d’initiative. Validez-les publiquement. Donnez-leur une visibilité interne. Ne les formalisez pas trop. Plus un rituel est adopté librement, plus la participation devient authentique et puissante. Les efforts d’engagement passif se traduisent par des cases à cocher. L’engagement volontaire donne de l’élan. C’est la différence qui compte.
Le pouvoir émotionnel et communautaire des pratiques naturellement évoluées
Les rituels les plus forts ne sont pas créés par les dirigeants. Ils naissent de l’émotion, de la répétition et de l’objectif partagés. Ils reflètent les valeurs d’un groupe sans nécessiter d’approbation officielle. C’est à ce moment-là qu’ils perdurent. Dans l’entreprise, comme dans d’autres domaines, ces rituels sont porteurs de sens parce qu’ils sont choisis et maintenus par les personnes qui font le travail.
Le Haka exécuté par les All Blacks de Nouvelle-Zélande avant chaque match est l’une des démonstrations les plus claires de ce principe. Il ne s’agit pas d’une tactique de motivation imposée par un entraîneur. Il s’agit d’une routine exécutée avec engagement parce qu’elle relie les joueurs à leur équipe et à leur histoire. C’est un comportement que les équipes choisissent de manière répétée parce qu’il les aligne mentalement et émotionnellement. Ce sont ces forces qui produisent l’unité et la résilience, et non des slogans ou des mesures de performance.
Le même concept s’applique aux organisations. Lorsqu’une équipe se réunit régulièrement le vendredi matin pour présenter des produits à moitié terminés et partager des beignets, elle ne se contente pas de socialiser ou de montrer les progrès accomplis. Elle promeut la transparence, encourage l’apprentissage et crée un espace pour les relations humaines. Ces comportements renforcent la sécurité psychologique. Aucune stratégie de ressources humaines ne la définit. Aucun cadre de productivité ne l’impose. Elle existe parce qu’elle fonctionne et que les gens y reviennent volontairement.
Les dirigeants doivent être à l’affût de ces comportements. Si un rituel renforce la cohésion, la transparence ou l’alignement sans structure formelle, ne l’interrompez pas. Reconnaissez sa valeur et vérifiez s’il peut être étendu à d’autres équipes. Acceptez toutefois que certains rituels ne fonctionnent que dans des contextes spécifiques. Les forcer à se répandre peut détruire leur authenticité.
Concentrez-vous sur l’existence d’un engagement émotionnel. Identifiez les comportements sources qui génèrent cet engagement et comprenez pourquoi ils sont importants pour les gens. C’est l’architecture d’une culture qui se développe par conviction, et non par mandat. Les rituels authentiques résistent à l’épreuve du changement parce qu’ils appartiennent aux personnes qui les ont créés.
Principaux faits marquants
- L’engagement s’accroît grâce aux rituels : Les employés s’engagent mieux par des comportements d’équipe répétables et significatifs, et non par des initiatives de ressources humaines imposées d’en haut. Les dirigeants devraient chercher à savoir où l’engagement se manifeste déjà et le soutenir au lieu de le créer de toutes pièces.
- Le rôle des RH est d’amplifier : Les RH devraient jouer un rôle de facilitateur en identifiant les rituels menés par les employés qui construisent la culture, puis en favorisant leur développement dans l’ensemble de l’organisation. Les dirigeants devraient donner aux RH les moyens de soutenir ce qui fonctionne plutôt que de s’approprier chaque effort d’engagement.
- La culture devient visible à travers les actions quotidiennes : Les valeurs n’ont d’importance que lorsqu’elles se traduisent par des comportements cohérents et intentionnels. Les dirigeants doivent repérer les rituels de l’équipe qui correspondent aux valeurs fondamentales et les renforcer afin de combler le fossé entre la culture déclarée et l’expérience vécue.
- L’engagement volontaire est le moteur d’une véritable dynamique : Lorsque les rituels sont choisis par les équipes, ils suscitent une adhésion émotionnelle plus forte et une participation soutenue. Les dirigeants devraient cesser d’imposer l’engagement et créer plutôt les conditions permettant aux équipes d’initier et de s’approprier leurs pratiques culturelles.
- Les pratiques authentiques sont plus efficaces que les pratiques forcées : Les rituels qui se forment naturellement, comme les sessions de démonstration ou les moments de reconnaissance partagée, ont plus d’impact car ils reflètent une véritable dynamique d’équipe. Les dirigeants devraient identifier et protéger ces traditions organiques plutôt que de les formaliser prématurément.